jeudi 21 juillet 2011

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Visiblement, c'est pas possible de commenter ici. Donc zou, on déménage sur Overblog, avec le même nom de blog. Allez zou !!!! http://fragmentsdame.over-blog.com/

mardi 19 juillet 2011

Omar m'a tuer **


En choisissant de transposer l'une des affaires judiciaires les plus marquantes de ces dernières décennies, Roschdy Zem nous livre un beau moment d'émotion, imparfait mais sincère et fort.

Le jeune réalisateur a su prendre le meilleur des deux histoires qu'il monte en parallèle pour en sortir un récit militant, mais également révélateur d'un triste constat. Aujourd'hui, les membres de la haute sont toujours mieux protégé, malgré la justice républicaine, et l'argent fait le bonheur des riches, ainsi que le malheur des pauvres.
Mais son film est également un appel à tous les misérables. Par le courage de son avocat, son combat personnel et l'acharnement de sa famille, Omar Raddad est aujourd'hui libre, et espère prochainement être réhabilité.

Oui, c'est bel et bien cette version qui est défendue par Roschdy Zem, mais malgré tout, il ne tombe pas dans le violent réquisitoire.
Son film est avant tout un film sur le combat d'un homme prêt à tout pour recouvrir son honneur et sa dignité.
A ce titre, Sami Bouajila est absolument bouleversant. Son regard seul est d'une telle intensité qu'il suffit sans parler plus que quelques mots de français à susciter une grande émotion. Il se met dans la peau d'Omar Raddad avec une aisance stupéfiante et se place déjà en candidat pour les prochains césars.

Malgré tout ce que l'histoire apporte au final en réflexion, c'est la partie concernant la contre enquête menée par Pierre Emmanuel Vaugrenard qui se révèle le point faible du film, et qui lui fait perdre en intérêt, en hachant la partie concernant le calvaire d'Ommar de passages franchements dispensables sur les énièmes tentatives de prouver que tout cela n'est pas possible. On sent que Roschdy Zem a voulu faire passer son message réquisitoire via cette enquête et c'en est parfois gênant.
Heureusement, il réussit in extremis à rétablir son intérêt, notamment lors d'une belle scène de rencontre. Il parvient à faire passer dans cette rencontre un message quelque peu paradoxal, lorsque le photographe demande à l'écrivain, pourtant fraichement nommé à l'académie française de s'écarter pour prendre en photo le sujet de son livre, Omar Raddad. Seul.
On s'étonne alors, et on se demande si son but était d'exclure un peu par jeu l'écrivain qui s'en était finalement servi comme simple sujet ou de dénoncer cette société qui exclut la classe intellectuelle pour se consacrer aux faits divers.

La mise en scène est sobre et soignée, et ne fait pas de fautes de gout. Roschdy Zem parvient à rendre crédible son montage malgré un essoufflement des deux parties de par leur entremêlement même. Au final, on sort donc du film avec l'impression d'avoir passé un bon moment, honnête et bien scénarisé, cachant bien son jeu, malgré une simplicité apparente.

Et comment ne pas retenir cette dernière scène, très forte, où on voit Omar verser des larmes dans sa salle de bain. L'aliénation qu'il a subi avec la prison se traduit par sa tristesse d'être devenu étranger aux yeux même de son propre fils.

vendredi 15 juillet 2011

Blue Valentine ***


Ryan Gosling et Michelle Williams sont extraordinaires.
Non content d'avoir fait le bon choix en tournant pour Winding Refn, ainsi que d'avoir fait le bon choix de smoking pour la montée des marches (il était plus sexy, original et élégant que toutes les personnalités ayant foulé le tapis rouge cette année. Seul Jude Law lui rendait en attirance), Ryan Gosling interprète à la perfection ce rôle de grand dadais, spontané et aimant, mais maladroit.
Michelle Williams, sorti du tournage de Shutter Island et de La dernière piste (que je vais voir demain :) ) lui rend la pareille avec sa touche de fraicheur, que va mettre à rude épreuve les tourments de la vie.
Plus que leurs prestations, c'est leur alchimie qui bouleverse. Ils ne jouent plus, ils sont, ils n'imitent pas, ils font, ils ne se connaissaient pas, mais ils s'aiment à la folie.

En montant en parallèle la rencontre et l'amour naissant des deux jeunes adultes, et la flamme vacillante de leur passion, Derek Cianfrance questionne dans la profondeur sur le pourquoi et le comment.
Jamais la réalisatrice ne nous donnera d'indice concrets sur cette tragédie qui aura emmené deux êtres à passer d'un bonheur si parfait à une séparation si brutale.
C'est cela qui fait de Blue Valentine un tel coup de cœur. Rien n'est dévoilé, mais tout est suggéré.

Car au long de la séance, on ne cesse de voir deux personnes qui savaient communiquer dans les silences, se comprendre simplement en se regardant, mais qui au fil des épreuves, ne savent plus comment se parler, se comprendre et s'entendre.

Poussé à bout par les épreuves de la vie, la flamme va s'éteindre pour ne laisser place qu'à un vide d'une profondeur infinie, comblé de souvenirs. Entre ces deux jeunes gens qui se mariaient plein d'espérance, et cet homme éploré qui demande à sa femme une seconde chance, et qui pleure pour un amour disparu et une fille déchirée, la vie n'a fait que son œuvre.
Entre les instants de grâce des débuts et les disputes de la fin, le sentiment amoureux aura disparu, faute d'avoir été alimenté.
Comme un symbole, c'est dans une maison de retraite, en visitant deux vieilles personnes perdues et seules que naitra leur amour. Le symbole est aussi poignant qu'on en connait déjà l'issue.

Derek Cianfrance trouve la distance idéale, quelque part entre réalisme et volonté de filmer quelque chose d'immatériel.
Si on peut lui reprocher d'avoir été un peu trop attentive à la noirceur de son récit, au point d'en perdre par instant la nostalgie pour un banal sentiment dépressif, elle aura su se rattraper in extremis grâce à cette séquence d'une mélancolie poignante où se confondent les images de deux êtres qui s'unissent dans l'espérance, et d'un homme qui s'éloigne. Seul.

mercredi 13 juillet 2011

Christophe au sujet de Harry Potter 7.1 *



Je n'avais pas parlé, il y a quelques mois, de mon avis au sujet d'un certain premier volet du dernier tome des aventures de ce cher Harry Potter.
Le deuxième et tout dernier (?) volet de la saga à peine sorti (sortira-t-il prochainement un Harry Potter : Voldemort au cinéma ?), je ne peux finalement me garder d'évoquer ce volet ma foi fort palpitant des aventures de notre petit sorcier, ne serait ce que comme piqure de rappel à l'aune d'aborder pour la dernière foi au cinéma la folle scolarité de Harry Potter.

Plutôt que de m'embarquer dans une longue et rébarbative critique sur un film dont je ne me souvient plus assez (mais que j'ai retenu plus que d'autres sortis à la même époque) pour en parler, j'ai choisi de laisser la parole à mes chers confrères.

Bien entendu, cette initiative est née dans un but non avouable. Mettre en guest star la critique d'un Christophe... Surprenant !

Le lien vers la critique de Christophe.

Ma foi, on peut s'incliner devant Christophe pour cette impressionnante démonstration de virilité.
Christophe parait gentil, prêt à distiller ses connaissances en matière de cinéma, mais quand il s'énerve, mieux vaut ne pas être la cible de ses invectives. Il devient aussi bavard et fourbe qu'une folle en chaleur entouré de folles en chaleur sur le bord de la piscine d'une croisière gay, mais en restant aussi profond et vrai dans ses propos que le Christophe qu'on connait. C'est dire s'il peut livrer des vérités terrifiantes.
Non content de massacrer le livre de JK Rowling, l'assimilant à de la littérature pour geek, il dénonce également les acteurs et producteurs qui nous prennent pour des débiles mentaux en tournant deux films au lieu d'un pour se faire du fric. Et ça se termine en beauté lorsqu'il prend soin de défoncer à coup de 4x4 le monument dressé à la fierté des geeks de tous poils et de tous horizons.
Christophe nous surprendra toujours, et dès septembre nous sera dévoilé son film inavouable. J'en tremble d'avance !

vendredi 8 juillet 2011

Balada triste ****


Je ne regarderais plus jamais les clowns de la même manière après ce Balada triste.
Très sérieusement, voir un clown triste ivre d'amour et de vengeance massacrer la tronche du clown joyeux, qui est en fait une brute odieuse, puis s'auto-massacrer le visage à coup d'acide et de fer à repasser, c'est une expérience assez édifiante.
Et encore, ce n'est qu'une petite partie des exactions qu'Alex de Iglesias fait subir à ses personnages au nom d'un jusqu’au boutisme malsain.

Dès la séquence d'ouverture, le ton est donné. D'un coté, les rires des enfants devant les facéties des clowns laissent penser qu'il s'agit d'une fable certes un peu malsaine, mais destiner à amuser.
Mais très vite, voilà notre clown joyeux plongé dans l'enfer de la guerre civile espagnole. Pris d'une folie meurtrière, il massacre le bataillon ennemi. 
Voilà ce que révèle ce très grand film, à travers un générique qui mêle image des plus grands dictateurs mondiaux, des vacances au soleil et autres joyeusetés. L'absurdité de la vie, de la mort, et surtout de la violence et de la haine.

A travers l'enjeu le plus universel qui puisse exister, la lutte pour l'amour d'une femme, Alex de Iglesias fait ressortir tout ce qu'il y a de plus brutal et primaire en nous.
On n'a plus affaire à des êtres moralisés, mais bien à des archétypes grossiers et barbares. Une femme comme possession béate, deux hommes qui luttent en détruisant tout sur leur passage.
Et le réalisateur génial se met à la hauteur de ses personnages.

Avec des ruptures de ton permanente, un mauvais gout persistant, un montage taillé au hachoir, qui ne laisse pas une seconde de répit, et un soin de chaque plan, on est embarqué dans cette aventure incroyablement puissante. L'ambiance est pesante, mais ludique en même temps. Le tour de force réussi par Alex de Iglesias est très fort.

On pourrait penser qu'une telle avalanche de mauvais gout permanent finirait par faire décrocher son spectateur, mais il n'en est rien. On est constamment surpris, et le rythme allant crescendo atteint son apothéose magnifique lors d'une séquence dantesque au sommet de l'immense croix franquiste.
A peine la belle morte, le pilote de moto suicidé que les deux clowns se retrouvent dans la camionnette, et jouant leur rôle dans la comédie humaine, rient et pleurent le malheur arrivé.

dimanche 3 juillet 2011

Beginners ***


Avec simplicité, personnalité, et une naïveté touchante, Mike Mills nous touche encore au cœur.
Il nous livre un film touchant, une belle histoire d'amour, de celles qui font reprendre gout à la vie.

Car c'est de ça qu'il est question dans Beginners, la perte progressive de l'espoir, de cette petite étincelle de vie, quand la routine détruit la magie.
 Dans une ambiance très nostalgique, presque morne, Mike Mills arrive à faire ressortir les moments où opère la magie de l'amour avec un peu de naïveté dans les dialogues mais une nostalgie mature en permanence, comme une vision du passé.
Le rythme lent pourra rebuter certains, mais devient une pesanteur nostalgique, qui saisit par la beauté de ses instants de grâce. Signe de cet beauté de la vie ordinaire, qui nous prend lorsqu'on y croit, qu'a su saisir Mike Mills.

C'est son Oliver, grand rêveur et artiste dépressif, qui incarne son personnage omniscient, qui ne sait lui même plus où il en est lorsqu'il rencontre Ana.
L'actrice mystérieuse laisse planer beaucoup de zones d'ombres, et c'est ce qui attire Oliver, et qui les poussera ensemble. Et c'est au moment de réaliser la routine du couple que ça ne marche plus.
A cet idéal de couple défaillant, Mike Mills oppose le milieu homosexuel de son père, vivant au jour le jour, plein de joie, d'amitiés, de rencontres, d'amour, qu'Oliver perçoit chez son père.

En mettant en relation ces deux relations, celle d'un amour fort entre un père et son fils, et celle d'un amour naissant entre deux amants, Mike Mills réussit un joli film qui aborde avec talent le thème du couple. Il le montre ici comme un chantier permanent, fragile, qui peut du jour au lendemain s'achever, se briser, et qu'il convient de construire en s'aidant de son passé. C'est grâce à son père, mort quelques mois plus tôt, qu'Oliver se relève et essaye d'aimer Anna avec l'amour que lui aurait porté son père.

Le film doit en grande partie sa réussite à ses acteurs. Ewan McGregor est bouleversant d'humanité, Mélanie Laurent prouve qu'elle peut (très) bien jouer, et Christopher Plummer complète ce trio dans un rôle aussi surprenant que touchant.
Une très belle réussite de cette année, et un bon jalon dans la carrière de l'ex clippeur Mike Mills.

mardi 21 juin 2011

Bilan du festival de printemps

S'il n'y avait qu'une chose à retenir du festival de printemps, laquelle serait-ce ?
Les restes brisés d'une enfance qui aura été le thème principal ou secondaire de 3 films en sélection ? La lacheté d'un père ? Ou au contraire l'abnégation de parents dans la défense de leur enfant ?
Peut être aussi la trahison ? Les coups dans le dos ?
Peut être aussi l'espoir ?
Peut être la mélancolie, la tristesse ou même la joie ?

Ce que je retiens, c'est que le cinéma a réuni une nouvelle fois 16 personnes autour d'histoires fortes, de récits qui bouleverseront peut être des vies, l'espace d'un instant.

Le festival de printemps a tenu toutes ses promesses. Loin de la théâtralité froide, bruyante et vaine du flocon d'or Black Swan, mes deux grands gagnants de ce festival sont deux films qui marqueront l'année, dont un chef d’œuvre qui marque l'apogée du talent d'un immense metteur en scène.

Peut être qu'il y a eu des déceptions, notamment le dernier Woody Allen, séduisant mais vide et creux, ou encore l'aseptisé Conquête et le faiblard et moyennement écrit Gamin au vélo, qui convainquait tout de même sur d'autres terrains.
Mais dans la vie, il ne faut pas retenir ce qu'on pourrait avoir, ou ce qu'on aurait pu avoir, mais ce qu'on a et ce qu'on a eu.
Le festival de printemps a tenu toutes ses promesses.

dimanche 19 juin 2011

Le chat du rabbin **


Au coeur de la ville d'Alger, il y avait un chat. Ce chat appartenait à un rabbin. Ce rabbin avait aussi un perroquet. Un jour, le chat décida d'avaler le perroquet tout net. Et le chat y gagna une voix.
Manque de chance, cette voix, c'est celle de François Morel, et à la longue, elle tape un peu sur le système.

Mais finalement, si nous mettons de coté ce "petit" handicap, Le chat du rabbin s'avère être un petit divertissement plus que recommandable.
Voir pendant 1h40 des personnages mener de longues joutes verbales à coup de "des juifs noirs, ça ne s'est jamais vu" et autres répliques didactiques pourrait finir par lasser, mais finalement, on se prend au jeu, grâce au second degré omniprésent et surtout beaucoup plus adulte qu'il n'y parait. C'en est même parfois assez gênant quand on note que le public dans la salle était composé dans sa majorité de parents avec leurs enfants.

Mais pour nous autres adultes, ça ne pose aucun problème. D'autant plus que l'animation est à la hauteur. Le style graphique est magnifique et donne un charme très oriental à ce dessin animé made in France. Contrairement à un certain film d'animation (destiné au flop monumental), on sent ici la touche d'un auteur.
Le style est coloré, vif, parfois déjanté et psychédélique.

Certaines séquences sont vraiment enchanteresses. C'est le cas de toutes les séquences avec le russe trouvé dans la caisse, ou des moments de calme entre le rabbin et le cheikh. Le style graphique se délite volontairement pour une superbe séquence lorsque le valeureux russe arrive dans la cité tant cherchée et tombe sur des autochtones tout aussi racistes que les blancs du nord. On a également droit à une séquence assez hilarante d'apparition de Tintin, avec la voix de François Damiens (forcément).
 
En plus d'un graphisme, de dialogues enchanteurs, les personnages donnent une dimension émouvante au film. Ils sont enjoués, chaleureux, et donnent envie de faire ce voyage à leur coté. Même les plus antipathiques, comme le russe dépravé, sont, de par leur caractère unique des personnages sympathiques.
Et c'est là que commencent les problèmes. On avait cité François Morel, et bien à son image d'hyperactif exhubérant, le film va à 100 à l'heure. On sent parfois que le rythme devrait se poser un peu, avec parfois de magnifiques paysages. Mais non, il faut qu'il y ait 10 trucs qui se passent à la seconde, il faut qu'il y ait des doubleurs qui nous enerve toutes les 5 secondes avec leurs personnages exhubérants et leur doublage à coté de la plaque (le russe dépravé puisqu'on en parle en est le meilleur exemple).
Ne parlons pas de ces fameux dialogues qui partent souvent dans le didactique cérémonieux. Si parfois, Joan Sfarr parvient à en faire des moments franchement prenants, comme le combat entre le russe et le fils du prince musulman, le racolage devient poussif.

Non vraiment, ce chat du rabbin n'est pas idiot du tout par son ton anticonformiste, sa dénonciation de la religion qui ne fait que ternir notre passage dans cette vie, une religion qui n'écoute que ce qu'elle a envie d'entendre. Mais vraiment, il est trop saoulant pour convaincre, et finalement anecdotique.

vendredi 17 juin 2011

Une séparation ****

Deux chaises. Sur l'une d'elles, une femme, sur l'autre un homme. Face à eux, vous êtes seuls juges.
Une séparation est un film qui s'adresse à son spectateur, à son jugement. Il prend la forme d'un témoignage, et seul le spectateur peut juger, tant les personnages ont tous raison et tort.
Au fur et à mesure de l'enquête, chaque personnage s'esquisse un peu plus et le jugement devient plus difficile, les frontières entre la justice et l'équité s'estompant un peu plus.
Tous les personnages sont bouleversants par leurs motivations, aucun n'a tort ou raison.

Asghar Farhadi évite le piège de la neutralité factice grâce à un scénario d'une rare intelligence, pleinement réaliste, qui parvient à transformer une tranche de vie en thriller, et non l'inverse.
En se mettant au plus près de ses personnages, avec cet assemblage de plans fixes laissant parler les personnages dans les limites du cadre, comme présentés à l'oeil extérieur du spectateur, le réalisateur iranien parvient à insuffler une formidable vie dans son film.

Il est bien aidé en cela par des acteurs tous bouleversants. Leur prix d’interprétation collectif à Berlin est totalement mérité. Chaque réplique sort du cœur, on les sent à fleur de peau, comme une façon de rappeler le contexte particulièrement douloureux de cette vie iranniene.

Car il faut bien avouer que Asghar Farhadi a su également éviter le piège du documentaire incendiaire sur l'Iran.
Pas de dénonciation du voile, des violences policières, de la propagande ou de je ne sais quoi. Ce ne sont que quelques indices qui laissent percevoir le difficile train de vie de Téhéran. Le chômage, les difficultés d'assurer un avenir à ses enfants, les salaires de misère, la misère de la famille dont le père est arrêté par les créanciers, condamné à payer encore et encore son du à la société. Tout est présenté au spectateur dans le cadre de l'histoire, de façon parfaitement neutre, rien n'est surligné, le spectateur est toujours seul juge.

On ressent tout de même une vraie prise de parti du réalisateur.
Ce que Asghar Farhadi semble condamner, c'est cette justice à double vitesse, cet asservissement de toute une classe de travailleurs extrêmement par une classe de créanciers et de fonctionnaires. Cet aspect devient particulièrement dérangeant pour le spectateur occidental vivant au hasard en France (tiens tiens) qui en fait toujours l'expérience, en dépis des siècles et de la démocratie.
Le réalisateur semble presque placer délibérément le spectateur occidental dans la position du juge qu'il n'a que trop connu, mais qu'il se révèle comme d'habitude incapable d'assumer.

Jusque dans un ultime pied de nez à la culture du divorce occidentale avec ce plan final sur lequel est étalé le générique final. Le père et la mère sont assis et attendent. Vous avez, après ce premier plan entendu la plaidoirie des deux plaignants, maintenant, c'est à vous de juger, ils ne peuvent qu'attendre, attendre votre jugement.
Et ce jugement ne vient pas, puisque le spectateur reste dans la salle, à attendre que le réalisateur le fasse pour lui.

lundi 13 juin 2011

London Boulevard *


Difficile de faire un film de petits gangsters "à l'anglaise" crédibles quand on a aucun acteur compétent. Fort logiquement, bien loin d'atteindre les sommets d'un Guy Ritchie (arnaques, crimes et botanique) ou d'un Danny Boyle (Trainspotting), London Boulevard n'est qu'une suite de situations convenues. 
William Monahan est un triste scénariste hollywoodien qui semble avoir pris le pire de ce qu'il avait crée là bas (quoique crée est un bien grand mot, son coup d'éclat est un remake) en tentant de le moduler à la sauce britonne, en l’assaisonnant d'une intrigue amoureuse.

William Monahan n'a fait qu'un vulgaire copier coller de son oeuvre à Hollywood elle même copiée collée, et de ses inspirations anglaises.

On retrouve la musique assourdissante de Boyle et Ritchie, mais mal gérée, une sorte d'humour pince sans rire briton dont il a visiblement eu du mal à saisir le concept tant on ne rit pas une fois, et tant c'est vulgairement amené. 
Le scénario ne fait que reprendre ce qu'il avait fait dans les infiltrés en y ajoutant une touche de Ritchie. On retrouve plus ou moins les même seconds rôles crétins, le héros qui sort de taule, le boss fou, qui accessoirement jouait déjà le bras droit de Nicholson dans Les infiltrés, les pédés dandys ou serbo croates. Tout est prémaché par le "cinéaste" qui fait une sorte de bouillie indigeste.

Il essaye ensuite vainement de nous la faire avaler, ce qui s'avère difficile tant la distance qu'il a pris par rapport à l'action est grande. La musique assourdissante et le rythme aléatoire, naviguant entre l'épileptique et ellipses mal gérées, noient ici tout enjeu dramatique dans une soupe distancée (et "distancière") de cadres plats qui se voudrait plus ou moins drôle, ce qui est difficile quand on a aussi peu de talent que William Monahan. 

Il est ici privé de ce qui faisait la substance du dernier film qu'il ait scénarisé, les acteurs. Colin Farell déploie une belle énergie, gâchée par un jeu monoexpressif un peu soulant à la longue, le boss qui malgré une belle volonté semble constamment à coté de ses pompes. Et que dire de Ben Chaplin. Il est tellement ridicule qu'il saborde toutes les scènes dans lesquels il apparait. Pour ce coup, on peut dire que William Monahan n'a pas su diriger son acteur une seule seconde. Quel beau gâchis !!

Keyra Knightley aurait pu (du ?) être retirée de l'intrigue, tant elle est inutile. Lorsque le héros se fait finalement crever, on ne pense pas une seconde à "oh mon dieu il ne va pas pouvoir la rejoindre aux Etats Unis", on se dit juste à "Mais c'est quoi encore que ça ?" puis on se dirige vers la sortie.

Limitless °


Limitless restera dans mon histoire personnelle comme le film que j'ai vu le soir même où Doudou m'a annoncé brutalement qu'on ne devait plus se voir.
Souvenir teinté forcément d'amertume, d'autant plus que si la philosophie veut qu'on se souvienne du bon moment passé avec la personne qui nous a quitté, elle ne peut malheureusement pas s'appliquer à ce Limitless. Je n'irais pas jusqu'à dire que ce Limitless fut un calvaire, pas en si bonne compagnie, mais tout plaisant qu'il soit, il n'en reste pas moins un petit navet à gros budget. Un film qui se voulait ambitieux mais qui se plante par une représentation de son concept digne d'un débutant.

Pourtant, le pitch est intéressant. Explorant les dérives de l'industrie pharmaceutique, et surtout les dérives d'un homme qui devient trop ambitieux, les producteurs auraient pu en tirer quelque chose de justement plus ambitieux.
Mais comme pour compenser la folie des grandeurs de notre héros, ils se sont contentés pour cet ambitieux scénario d'un yes man. Et le résultat est en conséquence, un pop corn movie sans intérêt.

On sent venir le gros naveton au début, on le voit au milieu et on le maudit à la fin.
La réalisation est hyper tape à l'oeil, et noyée sous des tonnes de musique mal gérée.
Tous les enjeux dramatiques sont noyés dans cette soupe mal fagotée.
Ajoutez à cela une morale douteuse sur le conflit des générations, que ne comprendront que les spectateurs les plus attentifs, et qui sera forcément mal assimilée par les autres.

De ce marasme, on ne peut sauver que deux choses : Bradley Cooper et Robert de Niro.
Le second prouve film après film qu'il profite de son année cannoise pour regagner le respect de son public tandis que le premier n'a plus rien à prouver. Il est déjà l'un des meilleurs acteurs américains actuels et l'un des plus sexy.

Alors que retenir de ce Limitless à part deux acteurs ? Retenez au moins que si vous essayez de me faire gober ce film là une nouvelle fois, ne vous étonnez pas si je fonds en larme, si je vous agresse ou si plus simplement mon éventuel futur compagnon choisit de rompre peu après.
Bref à oublier.

samedi 11 juin 2011

Thor *


Malgré un casting en or massif, on peut dire que ce Thor se plante magistralement. Pensez donc, Anthony Hopkins, Nathalie Portman, deux oscarisés, avec à leur coté deux petits jeunes qui se révèlent plus que convaincant, Chris Hemsworth et Tom Hiddleston.
Commandés par un réalisateur confirmé, Kenneth Brannagh et disposant d'un matériel de base très intéressant dans sa volonté de replacer les évènements dans le contexte mythologique, Thor avait tout pour valoir le coup.
Et pourtant, et pourtant, c'est surement l'un des pires navets de l'année.

Kenneth Brannagh n'avait pas l'expérience de ce genre de blockbuster hollywoodiens, et se plante dans les grandes largeurs.
Sa réalisation est tellement cheap, comme les effets spéciaux, qu'elle en devient ridicule. Elle cède aux pires tics du cinéma d'action hollywoodien. Le sommet du ridicule étant atteint dans ce ralenti déjà mythique immortalisant un "oh... My... Good" de Nathalie Portman.

On aurait au moins pu se rattraper sur les scènes de combat, mais non, elles sont tellement mal filmées, montées, et bourrées d'effets dragon ball z qu'on a l'impression d'avoir sous les yeux le pire blockbuster des années 2000 en terme de spectacle.
Le rythme est beaucoup trop rapide et tout nous arrive dessus avec un enthousiasme tel que ça en devient ridicule.

C'est vraiment dommage car le scénario, s'il ne nous épargne pas le pire de l'humour américain, vulgaire et sex, est vraiment une perle dès lors qu'il est centré sur le personnage de Loki. Ce personnage remarquablement complexe nous fait entrevoir l'espoir d'une puissante tragédie. Malheureusement, lui aussi s'enfonce dans les poncifs, avec en point d'orgue une dernière confrontation qui se termine par le pire des poncifs du genre.

Mais le pire dans ce film est probablement la façon qu'a Marvel d'essayer de nous faire saliver pour les avengers, à coup d'apparitions en caméo (oeil de faucon) et de petits clins d'oeils, notamment ce fameux poncif, qui se révèle à la fin être un moyen de faire disparaitre un personnage pour le préparer pour avengers.

Oui, c'est raté, oui c'est raté. Que dire que dire ? Rien rien.

jeudi 2 juin 2011

La défense Lincoln **


J'ai presque honte de n'avoir jamais entendu parler de Matthew McConaughey avant de voir cette défense Lincoln. Mais finalement, au vu de ce qu'on dit de ses performances d'acteurs et de la prestation qu'il nous livre ici, ça vaut peut être mieux. Justement, en parlant du Matthew McConaughey d'avant, je suis allé voir ce film avec mon doudou, qui m'a dit avoir été un peu déçu par l'acteur, qui bien que toujours sexy, avait selon lui mal vieilli.
Bien loin de moi toute considération de comparaison, le Matthew McConaughey d'aujourd'hui est déjà bien assez sexy, et les scènes où son sex appeal font ressortir d'autant plus son jeu troublant et ambigu, qui sert un rôle taillé pour lui.

Mais assez parlé de doudou, de moi et de Matthew McConaughey. On est d'abord là pour parler d'un film.
Et cette défense Lincoln, puisqu'on en parle est assez réussie (mise à part son titre français, absolument incompréhensible).
Je dirais même que, si Brad Furman s'était épargné quelques tics foireux comme les flash back aussi grossièrement amenés par la mise en scène que finalement inutile et dans l'ensemble une réalisation de série B efficace mais impersonnelle, on aurait tenu là un grand film.
Oui, vous avez bien lu, un grand film.

Dans l'état actuel, c'est uniquement à son scénario machiavélique et à son acteur troublant (et sexy) que La défense Lincoln doit son charme.
L'idée de base du scénario est affreusement perverse. Il est assez rare de voir un film construit sur le personnage de l'avocat, en général cantonné au rôle de méchant gripe sou de service dans les films judiciaires.
Ici, les scénaristes ont été bien plus intelligents, pour nous parler de la faillite de tout un système judiciaire, représenté par cette affaire, dans laquelle le malheureux avocat se retrouve englué.
On ne sait jamais réellement où est la vérité, et lorsque la vérité sur l'affaire semble éclater aux yeux de notre avocat, c'est pour mieux se concentrer sur la façon dont l'intrigue va pouvoir être mené à son terme.
La double manipulation, le double jeu de Michael Haller vont faire en sorte de créer le malaise jusqu'au bout. Forcé de défendre un client qu'il sait coupable, il va en même temps faire en sorte que la vérité éclate au grand jour.

La façon dont les scénaristes ont amené les thèmes, pour synthétiser les errements de la justice américaine, est également troublante et dérangeante. C'est par les mots d'un coupable qui veut avoir l'air innocent que sort la principale interrogation. Ici, on battit une société sur le fait que les coupables soient en prison, pas que les innocents soient en liberté. C'est finalement toute une société qui n'en garde finalement que rancoeur et haine, et d'où le démon peut surgir n'importe quand et n'importe où. Juger de la culpabilité ou non de Jesus Martinez l'a conduit en prison, et le coupable n'en court pas moins.
La critique touche non seulement le métier d'avocat, à travers cette remise en cause de Michael Haller, mais également tout le système, basé sur des personnalités libidineuses, qui ne songent qu'à leur lutte (avocat versus procureur) et sont prête à venir présenter de faux témoignages.
Même les derniers mots de Michael Haller sont ambigus. Après l'avoir entendu vanter une société basée sur les innocents et pas sur les coupables (à travers une simple réponse à la question de son homme de main), le voilà qui repart dans un numéro cabotin d'avocat sexy, qui "fidélise la clientèle". Nécessité de survie et attrait irrépressible d'un système qui corrompt par l'argent (et la gloire), voilà qui devrait suffir à faire plier le plus intègre des hommes.

Quelle dommage vraiment, qu'un réalisateur digne de ce nom n'ait pas été aux commandes, afin d'extirper ce film de la banalité que ne mérite ni son scénario, ni son acteur.

Le complexe du castor ***


Le complexe du castor, où la parfaite illustration de ce que ciné indé américain haut de gamme veut dire.
Non, il ne faut pas crier à l'originalité folle, pour le troisième film de Jodie Foster. Mais oui, on a le droit de le considérer comme le haut du panier. Car un film qui s'assume jusqu'au bout, jusqu'à céder à des moments de franc mauvais gout, franchement originaux pour le coup, ne peut qu'être appelé haut de gamme.

Oui, il y a un coté cheap dans ce long métrage. Aussi cheap que la poupée castor ou que l'ex roi d'Hollywood Mel Gibson, que l'accompagnement musical ou que des bricolages que l'entreprise vendra des millions, mais surtout cet horrible environnement qu'est le lycée américain. Le cheap, cette marque de fabrique de l'indé américain, auquel Jennifer Lawrence commence à être habitué (même si elle s'en est échappée le temps d'un excellent volet de X-MEN).
Mais parvenir à transcender (réellement) ce coté cheap omniprésent, en en faisant un élément de la narration et un parti prix radical, c'est plus rare, et ça mérite un coup de chapeau (mesuré) à madame Jodie Foster.

Le complexe du castor commence sur les chapeaux de roue. Le ton ironique de la voix off commentant les premières séquences, couplée à une ironie distanciée communiquée par la réalisation juste et un rythme rondement mené, mais qui sait prendre son temps, font de cette première séquence (jusqu'à l'arrivée du castor donc), une séquence de cinéma drôle, qui sait poser ses personnage admirablement.

A l'arrivée du castor, le rythme sera plus mesuré, plus lent, avec parfois quelques longueurs, mais qui ne sauront faire oublier les séquences inoubliables dans lesquelles apparait Mel Gibson. C'est bien simple, dès qu'il apparait et commence à parler avec sa marionnette, il impressionne. Bouleversant quand il nous montre le vrai Walter, et d'un calme monolithique assez excellent dès lors qu'il s'agit du Walter montré par la marionnette. 

La force de Jodie Foster, c'est de privilégier l'humour. Cette distanciation ironique qui crée d'abord du rire de par les décalages, et de la vie, qui semble se créer autour de ce personnage, puis une impression de monstrueuse farce dès lors que le castor échappe à tout contrôle et que le monde se retrouve face à ce personnage peu commun.
La folie qui gagne le personnage atteint des sommets dans une séquence mémorable de lutte entre Walter et la poupée. La réalisation et le rythme du montage atteignent un degré de grandguinolesque distancié assumé sans commune mesure avec la production américaine de cette année. Voilà où sont ces séquences malades qui font toute l'originalité et la force de cet objet expérimental et barré qu'est le complexe du castor.
C'est la compilation de ces séquences les plus timbrés, avec musique foldingue et scénario en dent de scie, presque mécanique, qui créent un caractère à ce film.
Mais elle sait également appuyer sur les failles des personnages, avec certes des tics de l'indé américain, mais maitrisés à la perfection. A ce titre, la partie finale, suivant l'amputation volontaire de Walter, est simplement bouleversante. Les plans de ces jouets jetés à la décharge sont vraiment dérangeants, comme si la folie et la schyzophrénie s'était emparé de notre société pour mieux recréer une unité dans la surconsommation. 
Et la dernière voix off, qui clôt le film, nous fait verser une petite larme lorsque Walter redevenu enfin lui même sait gouter aux plaisirs simples de cette Amérique, en compagnie de ses enfants, en bon père.

Alors oui, Le complexe du castor reprend pour quelques séquences le pire du ciné indépendant américain, à savoir le lycée et une intrigue adolescente totalement inintéressante, mais même cette intrigue parvient à créer du sens, dans un climax final assez foudroyant, avec en toile de fond le discours de Jennifer Lawrence.
Jodie Foster nous a montré en un seul film comment insuffler de la folie dans un film pour donner du sens et de la force au pire de l'indé américain. Cet objet foutraque, inégal, mais foncièrement passionnant est à voir pour ses quelques séquences malades, malgré sa partie lycéenne ratée et vulgaire.

mardi 31 mai 2011

Le gamin au vélo **


Loin, très loin, des cimes d'arrogance magnifique de Tree of life, de nombreux cinéastes content des histoires de façon simple et (parfois) touchante.
Parmi ceux là, il y a les frères Dardenne. Succédant (avec Il était une fois en Anatolie) au grand prix du festival de Cannes à des hommes et des dieux de Xavier Beauvois, ce film simple et très sobre raconte avec sincérité l'histoire d'un gamin prêt à tout pour retrouver son père.

Je n'avais jamais vu de films des frères Dardenne, et ce Gamin au vélo me donne plutôt envie de continuer.
L'histoire, touchante, est racontée de façon très simple, sans fioriture. On peut regretter une mise en scène qui suit plus l'action qu'elle ne la commente, ainsi que quelque passages écrits quelque peu à la truelle, comme la rencontre avec le dealer, mais rien ne saura détourner l'attention du spectateur de l'histoire qu'on lui conte.

Cette recherche du père est universelle et touche tous les spectateurs.
Ce gamin au vélo ne trouvera pas le repos tant qu'il n'aura pas retrouvé le père qui devait venir le chercher au centre il y a un mois. On ressent son manque, et sa rage tout au long du film, dans les bagarres qu'il ne semble jamais vouloir perdre ou par son attitude renfrognée en permanence.
Le jeune Thomas Doret parvient à incarner ce personnage torturé en permanence.

Il est accueilli par la seule femme qui ait vu ce qu'il y avait en lui, et qui va le temps du film tenter de lui donner l'amour maternel qu'il n'a pas reçu, brillamment incarné par une Cécile De France bien meilleure quand elle est dirigée par d'humbles metteur en scène.
Ce n'est qu'à la fin, après avoir résolu ses complexes identitaires que le jeune garçon se sentira enfin chez lui chez sa mère de substitution.


Jusqu'au bout, dans une intrigue parfois cousue de fil blanc et surtout écrite à la truelle (la rencontre avec le gangster), les frères Dardenne instaurent cette ambiance étrange, en tension permanente, avec une certaine réussite, tant le jeune garçon est à fleur de peau. La scène finale est une métaphore étonnante qui peut signifier beaucoup de choses.
A l'image de cette scène, l'âpreté dans la façon de filmer des Dardenne rend toujours dérangeant les petits rien, le film en gagne une certaine puissance, mais reste tout de même mineur pour un grand prix à Cannes.

mercredi 25 mai 2011

Tree of life *****


Terrence Malick est en train d'acquérir une dimension égale à celle de Kubrick en son temps.
Jouissant d'une liberté quasi totale sur son tournage, tout juste freinée par les exigences commerciales au montage, Terrence Malick a pu exprimer toute la folie et toutes les angoisses qui sont en lui, avec une quasi arrogance qui mettra à terre le moins aguerri des cinéphiles, pour mieux cueillir et frapper en plein cœur les plus ardus.

Tree of life est un chef d'oeuvre monumental, surement la plus belle palme d'or depuis Elephant de Gus Van Sant. Un cri de douleur colossal d'un démiurge fou, mais avant tout d'un pur génie du septième art qui sait mieux que personne filmer et monter un cinéma de la pensée, qui sait toucher son spectateur dans ses interrogations les plus profondes.

Tous les éléments de cette gigantesque tragédie humaine s'imbriquent parfaitement pour former ce vaste essai sur la puissance divine, sous couvert d'un choix entre les pulsions naturelles et la voix de la sagesse
Tout renvoie à la peur de mourir, qui régit tout en ce monde.
Ces deux choix se résument ou à chercher désespérément à exister en montant socialement dans cette société de chair et de sang, et lorsqu'on a échoué inculquer les mêmes valeurs à ses enfants, ou à espérer, en prêtant allégeance à Dieu, à attendre avec angoisse un signe, quelque chose qui montrerait qu'on survivra au delà de ce monde.

C'est cette recherche désespérée d'importance, de vie, qui rythme nos vies. Alors que la grâce du film, que personne ne semble comprendre, renvoie plus à une forme de négation de soi même. Il s'agit d'accepter que nous ne sommes rien, et tout, que nous ne sommes qu'un élément d'un tout, une conscience générale.

Dans une seconde partie totalement folle, Malick renvoie notre existence à sa source, captant le big bang, jusqu'à l'apparition des hommes. Aidé par des images de synthèses magnifiques, il nous captive par une partie exposant la grandeur de la nature, mais également le lien invisible qui relie toutes les choses, qui fait que l'infiniment petit reflète l'infiniment grand, et inversement. Comme si le bing bang était la prise de conscience d'un univers, que l'état de fusion de tous les êtres s'arrêtait, pour créer la nature, belle mais foncièrement imparfaite.

Le génie de Malick se fait encore sentir dans une troisième partie somptueuse de par la fluidité exceptionnelle de sa mise en scène. Malick apporte une réponse indirecte à la question de la grâce et de la nature en faisant de son cinéma baroque assez opératique un monument de fluidité rarement vu au cinéma.

Et quelle nostalgie dans chaque plan !!
C'est notre propre enfance qu'on revoit, tendre et vraie, mais en même temps terrible. Les joies des premières fenêtres brisées, la découverte de la mort avec un camarade, le complexe d'Œdipe.
Le père castrateur, symbole de cette autorité rétrograde qui crée de la discrimination, du sexisme, qui crée une fracture entre parents et enfants, règne en maitre dans la maison, face à la mère, fluette, gracieuse, qui cherche à donner du bonheur à ses enfants et à se faire oublier, en vivant simplement, contrairement à ce père totalement soumis à sa condition naturelle.e

Pour le jeune Jack, qui se rappelle au début du film d'un discours de sa mère sur la voix de la grâce et la voix de la nature, ses pulsions enfantines et l'éducation du père vont le conduire à devenir cet être frustré, qui comme son père symbolise une société qui fait ressortir des clones de la génération précédente. Ils ne sont bons qu'à tenter d'exister, à faire régner l'ordre et la terreur dans leurs foyers, et à exprimer leur violence dans la société. Trop tard pour y changer quoi que ce soit. La frontière entre l'état de nature et l'état de grâce est mince, et nous sommes du mauvais coté depuis trop longtemps.
C'est sa prise de conscience, qui nous est racontée durant le film (puisque le milieu du film n'est qu'un long flashback), et qui le pousse à la fin, à lier à tous les êtres qu'il a aimé ou aurait du aimer, dans un état de grâce absolu.

Dans une dernière partie qu'on sentirais presque forcé si on adhérait à la doctrine athée commune, l'idée même de fusion, d'abandon total prend forme, dans une suite de visions psychédéliques évoquant tantôt un homme qui a pris conscience, tantôt sa vision fantasmée d'un tout uni, dans lequel enfance et vieillesse se confondent et tous les êtres réunis.

Malgré un montage presque froid, qui ferait penser à une peinture abstraite plus qu'à un film de cinéma, les acteurs ont toute la place pour s'exprimer. Le jeune Hunter McCracken parvient à faire ressortir toute la douleur de son personnage torturé, mais c'est surtout Brad Pitt, brillant en père frustré et autoritaire, et encore plus Jessica Chastain, lumineuse, qui crèvent l'écran. 

Ce sont de petits évènements qui sont décrits ici, mis en relation avec de grands évènements. Comme le dit si bien Malick, l'infiniment petit reflète l'infiniment grand. Et les hommes ne seront eux même qu'une fois unis, privés de leur condition naturelle, mais revenant au créateur sans peur, disant Adieu à leur existence propre. C'est un paradis céleste, dont il faut prendre conscience.

vendredi 20 mai 2011

La conquête **


Saviez vous que Nicolas Sarkozy était un chic type ?
Et bien vous l'apprendrez dans La conquête. Nicolas Sarkozy y est représenté comme un brave type qui "n'a pas choisi la politique mais a été choisi par la politique". Oui, il aime sa femme. Oui c'est pour elle qu'il part gagner les élections.

Et à l'instar du personnage central, tous les hommes politiques sont présentés sous ce jour étrange d'hommes qui n'étaient pas des sales types à la base. Même De Villepin semble capable de se sentir touché lorsque son président et "ami" Jacques Chirac fait son AVC.
La réussite de La conquête dans sa mission de représentation de la vie politique est indéniable. En respectant scrupuleusement (peut être trop) la vérité historique (Clearstream, les émeutes en banlieues...), Xavier Durringer peut imaginer dans un carcan bien établi les interactions de ces hommes, faisant de chaque scène un petite saynète, dont la plupart sont très drôles, en grande partie car on connait les personnages.
Grâce aux excellents dialogues, et à des interprètes au diapason, Patrick Rottman et Xavier Durringer créent des personnages haut en couleur, caricaturaux, mais semblables à leurs modèles, et tellement vivant que finalement, on est prêt à tout laisser passer.

La politique, c'est une affaire de frustrés, qui se sentent obligé de jouer de leur libido pour se sentir forts.
Ils sont odieux dans leurs rapports, bien que restant parfaitement respectable en tête à tête. 
Ils ont tellement envie du pouvoir qu'ils n'hésitent pas à user de toutes les ficelles et semble en permanence à fleur de peau, à l'exception de Chirac, à la libido apaisée par ses années au pouvoir l'ayant amolli.
Ils sont chez eux dominés par leurs femmes, tenus en laisse par les couilles. Cecilia, qui a on se le rappelle trompé son mari parce qu'il était politique et que visiblement elle ne savait pas bien ce que ça impliquait pour la vie de famille, se permet de virer les hommes de la campagne de son mari, et Rachida avec un air de pouffiasse bienvenu d'en profiter en narguant ses petits camarades. Il n'y a qu'à voir son petit sourire satisfait de boniche lorsque les hommes se font virer du restaurant. Bernadette est également montrée comme la conseillère numéro une de son mari, qui le traite comme l'enfant qu'il est.
Du coup, les mâles ne semblent plus du tout méchants, ils sont juste pathétiques, et par là touchants, tandis que les femmes sont froides et calculatrices. 

Et le personnage de Nicolas Sarkozy est le plus représentatif de "l'homme politique".
Durringer montre à la fois son talent pour l'expression en public, avec une hargne contenue, et un sens de la répartie politique et tous ses problèmes privés, ce qui a pour effet de personnifier cette dualité dans l'homme politique, frustration qui entraine un déchainement phallique et donc une détermination sans failles.
Malheureusement, il se plante totalement dans les scènes intimistes. L'actrice qui joue Cécilia est d'une nulité sans nom qui contraste avec le talent un brin surjoué des interprètes masculins et les scènes sont d'une platitude à toute épreuve.

Durringer a une idée affreuse de mise en scène pour représenter la dualité de Sarkozy qui consiste en un montage parallèle entre les évènements de 2002 à 2007 et le jour de l'élection. Non seulement cela crée un rythme complètement foireux, mais donne en plus le ton en commençant par une image du "présidator", prostré, une alliance à la main alors qu'il aurait été de bon ton de commencer par les apparences plutôt que sur le réel.
On a une impression de toc, de faux rythme juste incroyable.

Il est par ailleurs bête de se rendre compte pendant ces scènes intimes que la mise en scène ne parvient jamais à créer des émotions. Et pour cause, elle se contente de suivre. La seule idée véritablement bonne que j'ai trouvé est celle du plan séquence assez réussi à la plage.

Heureusement, ce faux rythme a le mérite de privilégier les saynètes entre hommes politiques. Du coup, on ressort de la salle avec l'impression plaisante d'avoir passé un bon moment.
Ce n'est clairement pas un chef d’œuvre, mais on sort avec le sourire.

jeudi 19 mai 2011

Retour sur ... La trilogie du dollar ****

Première œuvre de Sergio Leone, œuvre de la maturation, qui aura permis de mesurer tous les progrès de son metteur en scène, au fil des trois films, fait proprement rare au cinéma, la trilogie du dollar est également un jalon exceptionnel dans l'histoire du western.

Arrivé en pleine période dite du western spaghetti, cette trilogie contribua à rétablir l'image du western tout en la reformant selon ses principes.

Loin de l'amateurisme né de l'ignorance des premiers faiseurs de western italien, elle permettra à son metteur en scène de devenir l'une des plus grandes légendes du cinéma moderne.



Leone imposera sa patte à un genre presque mort-né. Il assume ses influences et n'hésite pas à invoquer les grands maitres de l'âge d'or, tout en créant son propre langage cinématographique.





Pour une poignée de dollar (1964) **


Pour une poignée de dollars est le premier film de cette trilogie. Œuvre incomplète, manquant cruellement de maitrise, on pourrait dire qu'il s'agit d'un film raté si notre respect du maitre ne nous l'interdisait pas, et surtout grâce à la présence des deux premiers grands acteurs de Leone, Clint Eastwood et Gian Maria Volonte. Même la bande sonore de son compère Enio Morricone n'en est encore qu'à ses balbutiements, approche d'un nouveau genre cinématographique oblige.

On remarque tout de même qu'en dépit de son caractère inachevé, tout le langage de Leone à la mise en scène est là. Grand angle, zoom arrière, plans séquences étirés en longueurs, longs silences, gros plans...

Mais le principal élément du cinéma de Sergio Leone, son rythme lent, est ici sabordé par un montage trop rapidement haché, qui nous empêche de nous immerger pleinement dans l'histoire au delà de quelques séquences. La maitrise des gunfights n'est pas encore du coté de Leone. Mais si la maitrise n'est pas encore là, les éléments du style le sont bel et bien.

D'autant plus que le thème récurent de la trilogie, reprenant la vague de réalisme frappant le cinéma à cette époque est déjà là. Ici, pas d'indiens, de chevauchées héroïques à la John Ford. Simplement des américains qui se battent contre des américains. Ici deux bandes rivales opposés pour la prise de contrôle de la ville. La violence se trouve au sein même des camps déjà établis, puisque la corruption frappe les deux bandes. Il n'y a pas de héros, simplement des catalyseurs qui attirent et resolvent les problèmes. Ils sont eux même des membres du système et n'agissent pas pour perdre le système, mais de façon cyclique, simplement attirés par l'argent.

L'homme sans nom est le catalyseur idéal de cette violence, puisque son arrivé provoque la résurgence de la violence, qu'il finira par attiser de par son seul rayonnement. Clint Eastwood, qui joue ce rôle est autant mythifié par la caméra de Leone qu'il n'est réduit à un simple ressort dramatique, artificiel. Il est l'élément dramatique et esthétique le plus certain pour affirmer que Sergio Leone ne prend pas la voie du réalisme, qui frappe autant l'Amérique que son pays l'Italie, mais bien de la tragédie baroque.

Cette tragédie baroque amère est encore beaucoup trop soulignée, par une symbolique très lourde, comme l'utilisation de personnages féminins comme otages ou victimes sacrificielles.





Et pour quelques dollars de plus (1966) ***


Sergio Leone apportera son esthétique presque à bout pour nous offrir un premier classique. Et pour quelques dollars de plus arrive 2 ans après son prédécesseur, et 2 ans avant le premier chef d’œuvre du maitre, Le bon la brute et le truand.

S'il semble plus sur, Leone hésite cependant encore un peu entre les styles avec ce film. Alors que Pour une poignée de dollars explorait les pentes de la tragédie baroque, jusqu'à l’exagération, Et pour quelques dollars de plus renoue avec un cinéma de son époque plus réaliste. Il en résulte un curieux contrepoint entre des scènes sans fond musical (comme le tabassage en règle des deux tueurs à gage), d'une froideur presque réaliste, des scènes étranges, entre rêve et réalité, comme la séquence du jeu du chapeau, qui frappe par l'utilisation de toute la grammaire Leonienne, mais qui s'ancre dans le réel en oubliant les exubérances de Morricone un instant. Comme si la seule chose qui permettait au cinéma de Leone d'acquiérir ses lettres de noblesses en tant que tragédie baroque était la musique de Morricone. Heureusement, Morricone signe ici une bande originale culte, bien utilisée à de nombreuses reprises.

L'intrigue est également plus maitrisée que celle du premier film, mais la relative absence de climax et d'enjeux dramatiques majeurs crée un ennui chez le spectateur, le cadre de l'intrigue étant beaucoup trop resserré pour permettre des fulgurances lyriques, autrement que dans un duel final trop attendu. 

Et pour quelques dollars de plus demeure tout de même un film qu'on prend vraiment plaisir à suivre de bout en bout, son style plus intriguant et moins grandguinolesque que celui du premier volet de la trilogie lui donnant une vraie singularité.

Le film aura en outre le mérite d'introduire le troisième grand acteur de la trilogie, Lee Van Cleef, parfait en tueur à gage, ainsi que d'offrir une sortie royale à Gian Maria Volonte, qui joue ici le méchant.







Le bon, la brute et le truand (1968) *****


Heureusement, 2 ans encore plus tard, Leone nous sortira enfin son premier chef d’œuvre, hallucinant sur tous les points, Le bon la brute et le truand est aujourd'hui considéré comme un des plus grands classiques du cinéma contemporain. Il constitue l'apogée du western de Leone, le chef d’œuvre ultime de cette trilogie du dollar, la perfection stylistique après deux films coup d'essai qui se heurtèrent à tous les récifs de ce genre de cinéma.

Le style de Leone trouve enfin sa pleine expression. Fini les tâtonnements, tout est ici parfaitement cohérent. On connait les points qui font du style de Leone un cinéma à part. Ici, il enrichit encore son cinéma de singularité en nous proposant un vrai opéra baroque. La musique de Morricone crée une ambiance surréaliste, les phases non musicales sont bien mieux exploitées, et surtout, la musique s'adapte à toutes les situations et crée de la tension ou toutes sortes d'émotion comiques ou tragiques, loin du grandguignolesque exclusif des deux précédents volets. Toutes les perles visuelles de Leone se retrouve. On retrouve également une virtuosité dans l'exploitation des bruits extérieurs, comme cette séquence où l'armée marchant au pas cache à Clint Eastwood le bruit des assassins dans le couloir.

Le ton est beaucoup plus léger que dans les deux précédents essais, signes que le maitre a abandonné la pure tragédie du premier volet et l’âpreté du second essai. Les répliques cultes s'enchainent et l'exhubérance du troisième acteur Eli Walach (dans le rôle du truand) est là pour en faire un personnage ignoble et vil, mais terriblement attachant.

D'ailleurs elle est là toute la singularité de ce chef d’œuvre. Les personnages, qui prennent tous des figures de tragédie grecque, sont traités avec la profondeur psychologique que permet le cinéma.

On ne sait véritablement rien d'eux et on les découvre par leurs actes. Le héros solitaire, qui se fait le héraut de toute justice, ici le bon joué par Clint Eastwood, qui punit la brute Lee Van Cleef qui n'aura fait que se montrer ignoble durant le film. Le truand Eli Walach, en plus d'être le ressort comique principal joue le rôle de l'acolyte du bon. Il n'est pas réellement dangereux, juste un desesperado de plus, qui ne vaut pas bien cher. Il est ainsi terriblement attachant, dépassé qu'il est par les évènements, comme une sorte de témoin, echo au spectateur.

Pour la première fois, outre le personnage à la classe sombre et silencieuse, l'homme sans nom, on s'attache à un autre perrsonnage de cette aventure.

La brute, au contraire, ne suscite que le rejet de la part du spectateur. Il est le méchant idéal de l'aventure et se retrouve de facto puni par le bon à la fin.

La tragédie est bien là par le scénario, tant les climax s'accumulent. Le trio change tour à tour de dominant, les interactions entre les personnages varient. C'est simplement virtuose.

Et c'est le chef d’œuvre qui clôt en beauté cette trilogie exceptionnelle, jalon du western, qui aura apporté un style unique, une forme d'opéra surréaliste à ce genre mythique, loin, et en même temps si proche du romantisme de La prisonnière du désert.

Le festival de Printemps







Bienvenue à tous, blogueurs de tous âges, de toutes races, de toutes religions, et de toute je ne sais quoi encore. Chris remet son festival pour la troisième fois après les succès du festival d'automne (écrasé par Potiche, pourtant un navet) et du festival d'hiver (écrasé par Black Swan, pourtant très moyen). Pour la seconde fois, je vais participer, après l'excellent festival d'hiver. Et cette fois ci encore, la sélection est très alléchante.


Au menu, une balade à Paris par Woody Allen, spécialiste des clichés européens, une chronique familiale sur fond de philosophie par le formaliste Terence Malick, une balade enfantine en vélo par les frères Dardennes, un sketch des guignols de l'info avec des vrais personnages par Xavier Durringer (qu'on dit gauchiste), un Mel Gibson ressuscité (ou pas) dirigé par l'excellente Jodie Foster, des chats et des dieux (belle phrase promotionnelle) par Johan Sfar, une séparation primée à Berlin par Asgar Farhadi et un boulevard londonien par William Monahan.


Tous les détails ici

mercredi 18 mai 2011

Minuit à Paris - deuxième *


J'aurais la peau de Woody Allen. Non content de m'avoir fait croire que j'avais passé une bonne séance la première fois devant Minuit à Paris, il m'a ce soir achevé en me couvrant de honte et d’opprobre à la simple pensée que j'ai pu faire une critique élogieuse de ce film médiocre et y entrainer des amis.

Dès les premières images, le doute régnait déjà. "Comment, c'était donc si long les cartes postales au début ?".
Le film a fait ensuite illusion quelques minutes, le temps de poser le personnage de Gil Pender (excellent Owen Wilson), avec moults éloges à Paris et une série de dialogues interminables. La découverte des parents, clichés ambulants de l'américain moyen, et du pédant (bon Michael Sheen), ou dragueur bobo.

Mais voilà, si cette première partie est assez réussie, très vite ça va se gâter. La première intrusion de Gil Pender dans son passé va se réveler sommes toute plaisante, puisque le concept est assez ludique, mais très vite on y sent la faiblesse des dialogues. Les mêmes dialogues qui avaient relegués la première partie au rang de réussie alors qu'elle aurait pu (du ?) être excellente.
Et cela va aller en empirant. En cherchant desespérement à trouver les bons mots, Woody Allen allonge inutilement même les répliques qui auraient du être bonnes. Il casse tout effet comique par son chic toc des dialogues trop écrits. Moi qui m'était presque forcé à rire de chacune des blagues et des effets comiques la première fois, je me suis couvert le visage de mes mains tant je me suis rendu compte de la nullité de la chose.

Il se laisse en plus aller à la tentation du running gag. Les seul ressort comique du film sont ainsi le jeu des 7 familles (qui est qui parmi ces gloires du passé) et le jeu sur le temps, lorsque le personnage parle d'antibiotiques à son amoureuse du passé, ou lorsqu'il appelle à la rescousse ses amis du passé contre sa fiancée.
Et même ces running gag ont tendance à perdre toute efficacité dans la répétition. Les rencontres s'enchainent toute plus creuse les unes que les autres, bien que la rencontre avec les surréalistes soit d'un autre niveau. Les pauvres sont en plus réduits à des clichés vulgaires, ressassant sans cesse les mêmes phrases. Le seul ressort comique qui fonctionne est le dialogue sur le rhinocéros, car il a la chance d'être justement surréaliste, et surtout de ne pas durer trop longtemps (qui plus est, la crédibilité de Dali est bien aidée par son excellent interprète Adrien Brody).

Finalement, à force d'être entrainé dans une structure répétitive, le film finit par ne plus rien provoquer sinon l'ennui et se révèle totalement vide de sens, au delà de son message simpliste.
Que ce soit le passé ou le présent, rien n'est jamais réellement passionnant, bien que le présent retombe parfois avec plus ou moins de bonheur dans ce qui a fait le succès du new yorkais, la chronique satirique. Le passé est plombé dès lors qu'apparait Marion Cotillard. Les scène où elle apparait sont très longue, trop longue, et donnent lieu à des dialogues et divers éloges de Paris indigestes et sans aucune mesure.

Le dernier point noir du film, c'est d'avoir tant de comédiens talentueux, et de n'en faire que des pantins qui finalement finissent par perdre toute humanité et donc tout intérêt. Seul Owen Wilson s'en tire en singeant son metteur en scène de façon brillante, jusque dans les yeux exorbités, peut être les seuls moments intéressants du film (si on avait retiré les "oh my good moi Gil Pender, j'ai rencontré blablabla" de la scène du lit). Vicky Christina Barcelona était au moins sauvé du néant par un trio d'acteurs au sex appeal n'étant plus à faire.
Encore une fois, le style redondant et carricatural de Woody Allen a frappé, quel dommage, lui qui s'était lancé dans une belle nouvelle voix de carrière avec ce qui restera surement comme son chef d’œuvre, Match Point. (et avec des comédiens bien choisis).

Et pour bien montrer que j'ai honte d'avoir pu me convaincre de la qualité d'un film aussi moyen au point d'en publier une critique élogieuse, ben je vais la laisser cette critique élogieuse. Après tout, elle dit aussi beaucoup de vrai sur ce film, qui est certes raté, mais ne mérite pas non plus de jets de cailloux.

Au final, on retiendra tout de même que Minuit à Paris réussit l'exploit d'être très représentatif de Paris. Oui oui, vous lisez bien. Les théâtres de marionnettes avec des toiles que tendent les marionnetistes par dessus lesquels ils font parler tant bien que mal leurs personnages, ce film en est l'illustration parfaite. Un cliché parisien parfaitement réussit par Woody Allen. Pour le coup ça donnerait presque envie de leur donner la pièce à ces braves gens.

samedi 14 mai 2011

Minuit à Paris ***


Gil Pender s'ennuie. Il a une fiancée aussi sexy que gourde et superficielle, une future belle famille aussi conservatrice que terre à terre. Lui n'en a que faire de tous ces problèmes matériels. Ce qu'il veut, c'est se balader dans les rues de Paris, sous la pluie, faire revivre le passé l'espace d'une nuit ou d'une journée, pour fuir un futur fait de mort, de disputes et d'enfants.

Alors que sa fiancé s'entiche d'un bobo pédant parisien, que les horribles parents (américains, grossiers, incultes) de la demoiselle font leur petit tour dans le coin pour s'assurer que tout va bien, Gil va se balader dans Paris. Et à peine minuit sonné, voilà qu'un taxi des années 20 s'arrête pour le laisser monter.
C'est le début d'une aventure aussi loufoque que séduisante.
Plongé dans le Paris des années 20 qu'il admirait tant, Gil va rencontrer  Hemingway, Scott Fitzgerald, Pablo Picasso, Salvador Dali et autres Cole Porter et Luis Bunuel. Tant d’icônes qu'il n'imaginait que symbole d'un Paris perdu

Woody Allen choisit la voix de la légèreté et offre un beau défilé ludique de star, devant nos yeux aussi ébahis que ceux de l'excellent Owen Wilson, génial en artiste rêveur. Il compose un délicieux Paris des années 20, sublimé par de très beaux décors, et une photo un brin surréaliste, qui contribue à créer une ambiance feutrée et nostalgique.
Si ces personnages sont plus ou moins réussis (Picasso raté, Hemingway très bon, Adrien Brody brillant en Dali, Bunuel très bon ainsi que Scott Fitzgerald qu'on voit peu), les rencontres sont tant de moments magiques, Woody parvient à faire revivre ces gloires du passé artistique grâce à des dialogues ciselés.
La démonstration peut se révéler lourde (pot pourri comme je l'ai lu par ailleurs), mais l'humour omniprésent nous fait tout de même passer un très bon moment.
Notre new yorkais préféré se paye même des moments totalement détachés de l'intrigue, comme l'intrigue quasi inutile autour du détective, qui prend juste la place qu'il faut pour nous faire rire par une fin étonnante.

 Woody se joue des paradoxes temporels pour offrir des passages excellents, comme cette leçon de Picasso avec le bobo parisien, ou ces variations sur le thème des médicaments inconnus dans le passé.

Sous ses aspects de moment sans prétention, ce qu'il est d'ailleurs, Minuit à Paris est une belle leçon d'amour à Paris, à son histoire, mais surtout au présent et à la vie. Comme si la confrontation avec ce passé l'avait convaincu que seul la vie méritait d'être vécu, et que des années de mariage à vivre dans le passé n'était guère profitables pour lui, pas plus d'ailleurs que pour sa fiancée. Le personnage de Marion Cotillard est, à cet égard, vraiment intéressant. La pauvre femme se perd dans le passé et ne vivra jamais vraiment, contrairement à Gil, qui aurait aimé plus avec elle... Et qui rencontre son étonnante jumelle des années plus tard.

Minuit à Paris pourrait très bien rafler quelque chose au festival de printemps. En tous cas, sans être le chef d’œuvre annoncé par la presse, il vaut vraiment le coup.

Tomboy **


Drole de jeune cinéaste française qui ose parler de l'enfance des filles sous un jour particulier, Celine Sciamma livre un deuxième film à tendance autobiographique.
L'implication personnel de cette cinéaste des lesbiens se fait ressentir du début à la fin de ce tomboy.

Dès le début d'abord, avec cette mise en scène du fantasme de l'identification au père, cette opposition presque grossière avec la petite fille clairement identifiée à la mère.
Le fait de faire jouer le drame dans une famille unie n'est pas simplement un artifice scénaristique (comme j'ai pu le lire par ailleurs, chez des êtres dépourvus de sensibilité), mais comme une tentative de la cinéaste de se réconcilier avec ses propres parents. On sent tout l'amour qu'ils ont pour leurs enfants, c'en est très touchant.

Cela est accentué par la mise en scène très pudique de Celine Sciamma, qui sait rester à distance et laisser parler les émotions. Elle se contente de regarder (car on est clairement dans l'angle du voyeurisme) sans juger.

Très vite, Laure, l'héroïne, va se retrouver en interaction avec les enfants de son entourage. Et là, c'est le choc. Habillé en short et marcel, on la prend pour une fille. Surprise d'abord par la confusion de sa voisine Lisa, elle va très vite en prendre son parti et cultiver son identité masculine. A la maison, elle s'appelle Laure, dehors, elle s'appelle Michael.

Tous les fantasmes androgyne de la jeune fille . Le rejet de la condition féminine, la recherche de virilité, la volonté de ressembler jusqu'au bout à un garçon, l'attitude protectrice du père envers elle.
L'orientation sexuelle de la jeune fille se cristalise vite, lorsque Lisa tombe amoureuse de sa différence, sans connaitre son identité réelle.
Le film en devient presque malsain et pervers, la distance qu'a instauré la mise en scène devient voyeurisme léger, la sensualité à fleur de peau des jeunes filles apparait.
L'ambiguité des rapports de Laure avec ses proches devient dérangeante. Les fantasmes de la réalisatrice se font pressants.

Mais la réalité rattrape toujours le fantasme, et l'image que renvoie le miroir, au delà de son aspect androgyne est celle d'une femme qui ne pourra pas échapper à sa nature.
Au travers d'un évènement anodin, la supercherie sera révélée à tous. Les réactions des proches en disent beaucoup sur la jeunesse de la réalisatrice, rejet de la mère et compréhension du père, teinté d’ambiguïté (savait-il, imaginait-il ?). Finalement, Celine Sciamma revient dans le fantasme en réinstaurant une certaine ambiguïté dans le rapport mère fille, comme dans les relations avec la jeune Lisa.
La réalisatrice pardonne et s'excuse, et cette fin est très touchante.

C'est un film touchant, très personnel et bien mis en image. Si vous avez un certain rapport à l'androgynie et à l'ambiguité, nul doute qu'il vous touchera.

dimanche 8 mai 2011

Source code ***


Bien loin de la machine désincarnée et déshumanisée Inception, Duncan Jones, déjà auteur du prometteur Moon nous emmène dans un nouveau métrage surfant sur la vague des univers parallèles et de jeu avec le temps. 

Mais loin du manège orchestré et froid de Nolan, Duncan Jones frappe dès le début par sa remarquable agilité à nous immerger dans un rythme et à nous identifier à un personnage. 

La première scène est un modèle du genre. 
Après un générique plutôt intéressant alignant les vues d'un train de vie orchestré en plein fonctionnement, on termine notre course dans un train. Dans ce train, on se fixe à un homme. Cet homme se réveille et semble totalement dépaysé. Il se retrouve en face d'une jeune femme qu'il ne connait pas et qui lui fait la conversation comme à un amant.
On est saisi par l'efficacité avec laquelle Jones emploit l'arsenal du cinéaste malin. Décadrages, montage hyper cut, tout en laissant soin à son acteur de s'exprimer. La caméra suit le héros dépaysé dans ses mouvements, simplement et sans fioritures, et on se sent tout de suite rassuré sur la sincérité du film en même temps qu'on évite de se tuer les yeux.
Soudain, le train explose, tout le monde meurt et notre héros revient dans une sorte de machine à remonter le temps, en contact avec des officiels. On découvre sa mission, revenir encore et encore dans cette séquence de 8 minutes pour découvrir des indices susceptibles de démasquer le responsable de l'explosion.

Après une introduction aussi brillante, on pourrait penser que le rythme ira en faiblissant. Mais pas du tout. D'un coté, l'homme qui dit s'appeler Colter Stevens ne sait absolument pas ni qui il est, ni à qui il parle ni où il est, et est pressé par des généraux invisibles avides d'informations. On met donc du temps à s'habituer, tant les allez retour incessant sont menés avec le même talent par Jones. De l'autre coté, il tente de trouver plus d'indice à chaque fois, mais surtout, ses réactions sont différentes, il avance dans son enquête et sa perception du monde change à chaque détail qu'il observe.

Mais en réalité, ce qui donne vraiment toute sa dimension au film, c'est la façon dont il va, à chaque passage dans cette autre dimension s'attacher lui même à ces fantômes et tenter de modifier des évènements déjà figés. Pourtant, en dépit de l'apparente énigme insoluble, on remarque que la jolie damoiselle change de position à chaque passage, qu'il est capable de modifier en partie les évènements, de sauver temporairement la jeune femme.
C'est cela qui est absolument fascinant dans Source Code. Le film y gagne une profondeur inédite, jusque dans une séquence finale qui, bien que n'évitant pas LE poncif du genre, nous fait avaler une couleuvre énorme.

Il est vrai que le film comporte de nombreux défauts comme un certain manque de gravité dans le propos, un coté récréatif, qui bien que n'étant pas pour déplaire apporte tout de même un coté répétitif à une mise en scène qui finit sur l'espace d'un long par lasser, mais surtout qui se délite dans quelques artifices très américains, qui nuisent à la cohérence générale.
Les acteurs faisant le boulot contribuent cependant à nous faire croire à l'ensemble, et comme divertissement, entre ça et Fast and furious 5, vous savez quoi choisir.

dimanche 17 avril 2011

The company men ***


A peine sorti de l'escarcelle du tâcheron Klapisch, qui n'a pu en tirer qu'un navet abyssal, Ma part du gateau, le sujet de la crise financière et de ses conséquences tombe entre les mains de John Wells, réalisateur et scénariste de séries télévisés.

Et mon Dieu, grâce sois rendue à Wells pour avoir osé montrer autre chose que ce sale cinéaste gauchiste horriblement démago.

Loin de montrer les prolétaires réduits au chômage, Wells choisit de nous montrer la classe aisée, qui joue au golf, roule en porsche, part en vacances, vit dans des grandes maisons.

Finalement, en dépis de tout ce qu'ils ont obtenu, ils ne sont rien de plus que les petites gens. Aussitôt réduits au chômage, il ne leur reste rien. Qu'ont-ils fait de leurs mains ? Rien. Tout ce qu'ils ont accompli se résume dans un contrat de travail avec un salaire et un poste marqués dessus.

Malgré tous leurs avantages sociaux, ils vivent dans une peur absolue de se retrouver sans emploi, comme n'importe quel prolétaire.

La scène d'entrée est absolument terrible, on se doute de ce qui va arriver, mais l'angoisse qui étreint ces hommes et ces femmes et l'atmosphère d'incertitude qui pèse est superbement rendue. On croit au suspense, pour finalement voir une nuée d'hommes et de femmes, un carton sous le bras avançant d'un air hagard vers leur voiture.

On se prend tout de suite d'affection pour ces personnages grotesques. Ils se sentent au dessus, mais ils sont absolument ridicules.
Une seule scène suffit à les décrire, cet entretien entre Phil (Chris Cooper) et sa conseillère de l'agence de recherche d'emploi. 
Pour incarner ces personnages, on a le droit à un gros casting, Ben Affleck (Bobby) est superbe, ainsi que Tommy Lee Jones (Gene). Mais le plus impressionnant est Chris Cooper, il est absolument terrassant dans le rôle de cet homme qui a tout donne à son entreprise, depuis qu'il était ouvrier. Il respire le désespoir et le renoncement par chaque pore de sa peau.

La mise en scène de Wells est sobre et élégante. En épurant au maximum ses cadres, en instaurant un rythme lent et presque contemplatif et en choisissant un accompagnement musical discret, il communique une impression de spleen terrible. C'est du grand art.

Bien sur, on ne nous épargne pas un traitement typiquement américain. La confrontation entre le beau frère, incarné par un Kevin Costner écrasant de présence à l'écran, et Bobby prend l'allure d'une lutte des classes avant la réconciliation tant attendue, le fiston revend sa xbox pour aider ses parents.
 Très démonstratif, le film est très lourd dans son opposition d'un capitalisme sauvage avec un capitalisme à la papa, qui respecte ses employés. Il en résulte que le film perd quelques intérêt.

Qu'importe, la démonstration reste d'actualité et si la fin est clairement bâclée, le film demeure un modèle rien que pour le choix de John Wells de nous montrer ces cadres.

Assurément pas un grand film, mais à voir, vraiment, vous n'en ressortirez pas déçus. Un film référence sur la crise financière.

samedi 16 avril 2011

Essential killing ****


Soyez prévenus. Assister à Essential Killing, c'est être de tous les instants spectateurs mais aussi partie du film.

Le film ne dure qu'une petite heure et demi, mais on a l'impression d'avoir fait le voyage d'une vie lorsque le cheval rougi par le sang s'ébroue tranquillement, unique reste de l'existence de Mohammed.

Ce voyage extrême, loin de tous les codes du genre renverse son spectateur et l'entraine dans une expérience psychédélique.

Dès les premières images, on est plongé dans l'aventure. Le premier plan, filmé depuis l'hélicoptère est une merveille plaçant d'emblée le décor comme élément majeur de la narration. Ici, le décor est un désert, au sol blanchi par le soleil, plus tard, Mohammed, après un accident lors de son transfert, sera perdu dans la forêt sibérienne, dans le blanc purificateur de la neige.

Malgré son choix, pour son personnage principal d'un taliban capturé et torturé par l'armée américaine, Jerzy Skolimowski se révèle apolitique, il suit un personnage qui a des convictions, et la descente vers l'animalité se révèle d'autant plus puissante.

Une fois plongé dans l'aventure, on ne souhaite plus rien d'autre que de survivre, on fuit l'armée lancée à nos trousses, on s'extasie devant un poisson fraichement péché, on hurle, on lutte.
On n'est plus avec Mohammed, on est Mohammed.

Au coeur d'une nature sauvage, notre voyage prend la forme d'une libération vers un état animal.
Au fil de l'avancée, la mort qui était terrible devient une nécessité.

Comme devant payer son du à la société des hommes, notre belle tenue blanche, pure est aspergée de sang. Notre retour à l'état de nature laisse sa trace rouge sur la blancheur immaculé, pureté d'une nature souillée par notre présence.

La présence des animaux qu'on dérange d'abord comme ces rennes dont nous occupons le foin, avant d'intégrer leur présence, devenant proie après avoir été prédateur, nous intégrons notre état d'animal, membre du cycle naturel, proie idéale pour les loups.

Les quelques séquences de rêve onirique renvoient à la transformation en état animal, du rêve du passé, somptueuse image de la femme voilée sur la neige au rêve déshumanisé avec les loups, le personnage, alors que son enveloppe humaine agonise avance vers une voix de retour à la nature. La dernière image, le cheval blanc portant sur son flanc les taches rouge sang est particulièrement puissante dans sa symbolique d'un état naturel retrouvé.

Cette formidable prouesse est réussie haut la main grâce à deux hommes, deux fous névrosés qui partagent un fragment de leurs fantasmes l'espace d'un film.

Le génial Vincent Gallo, eblouissant par sa présence, sa force, son intensité.
Et le réalisateur Jerzy Skolimowsky. Il a tout compris au plan subjectif, au suspense (la première scène est un modèle du genre) et au rythme. Son expérience sensorielle démente nous plonge aux cotés de son acteur pour un trip dont on ressort bouleversé et changé. L'expérience, est riche, viscérale et puissante.

Chef d'œuvre.